Cet ouvrage offre une analyse anthropologique, sociologique et politique de la ville congolaise de Brazzaville. Les articles livrent plusieurs regards croisés sur la ville de Brazzaville, et de façon plus générale sur le Congo et quelques pays d’Afrique centrale (Centrafrique, Burundi et République Démocratique du Congo).
Le contexte socio-politique est celui d’une société urbaine post-conflit qui, après avoir été depuis 1993, le théâtre principal des violences guerrières, continue d’en porter la marque. Le flux des personnes déplacées, le choc psychologique créé par la machinerie de la mort gratuite ou programmée d’hommes, de femmes, d’enfants, par la destruction des biens mobiliers et immobiliers, ainsi par la persistance sourde d’un climat lourd dans une ville toujours en ébullition, prête à exploser à chaque échauffourée d’hommes en armes, conduisent les chercheurs en sciences sociales et humaines à envisager une autre approche plus serrée des objets étudiés.
Ce qui offre aujourd’hui à l’analyse de la réalité urbaine brazzavilloise, c’est tout un ensemble de faisceaux d’indices révélateurs de sens dont certains sont signalés ici et là à travers les différentes contributions. Signalons-en quelques-uns à titre heuristique.
Premièrement, la société urbaine brazzavilloise continue de subir de plein fouet la crise économique et sociale depuis les années 1986 avec l’ajustement structurel. Les retombées pétrolières bénéfiques de ces trois dernières années ne sont perceptibles que pour une fange minime de la classe dirigeante arrimée au marché international. Les crises politiques et économiques successives et les violences guerrières ont accéléré la montée de la pauvreté urbaine. Et pour survivre, les individus en situation de disette et vivant dans la rareté matérielle se livrent à une économie de la « débrouillardise », laquelle, par ailleurs, n’est plus seulement le fait des gens « d’en-bas » ; puisque la classe moyenne ayant, au cours de ces quinze dernières années notamment, basculé dans la catégorie de « nouveaux pauvres ». La béance de la fracture sociale entre nantis et démunis, entre les gens « d’en-haut » et les gens « d’en-bas » donne sérieusement à réfléchir sur des situations inédites et potentiellement éruptives. Même si les solidarités communautaires (familiales, claniques, associatives laïques et cultuelles) semblent masquer cette réalité urbaine, elles n’en révèlent pas moins l’une des formes complexes de la recomposition urbaine. Le processus accéléré d’individualisation en cours dans la société brazzavilloise, la lute pour la survie et la sécurité individuelle sans cesse menacée par les forces centrifuges rendent de plus en plus lâches toutes les solidarités communautaires. Ainsi, en fonction de leurs intérêts, de leurs capacités de négociation et d’adaptation, les individus modulent, orientent leurs discours et leurs pratiques dans un sens ou dans un autre.
Deuxièmement, la réflexion sur la réalité urbaine tient ici compte des déséquilibres sociaux et des dynamiques sociales en cours. En effet, Brazzaville porte bel et bien la marque de ses habitants, de leurs modes d’être, de leur rapport au pouvoir politique et des formes multiples de sociabilité. Parce qu’elle est aussi à proximité d’une autre ville, en l’occurrence Kinshasa, lire Brazzaville, c’est apprendre à déchiffrer un signe, un imaginaire du citadin, à dévoiler et à connaître un langage à travers les dits et les non-dits. Lire la ville, c’est également identifier des espaces sociaux spécifiques qui sont caractéristiques des temporalités historiques et sociales fragmentées où le citadin dit parfois sa souffrance sur un mode tantôt violent, tantôt sarcastique ; dénonce les travers de la société urbaine, la perte des valeurs éducatives, morales et familiales…
Le numéro comprend près de 11 articles avec 4 notes de Lecture.
Informations complémentaires
Date de parution | 2005 |
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Format | 160 pages, Format 240×170 mm |
ISBN | 9782842200145 |
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